domenica 2 novembre 2014

Le finestre

Chi guarda da fuori attraverso una finestra aperta non vede mai tante cose quante ne vede chi guarda una finestra chiusa. Non c'è oggetto più profondo, più misterioso, più fecondo, più tenebroso, più abbagliante di una finestra illuminata da una candela. Ciò che si può vedere alla luce del sole è sempre meno interessante di quello che avviene dietro un vetro. In questo buco nero o luminoso, vive la vita, sogna la vita, soffre la vita.

Al di là delle onde dei tetti, scorgo una donna matura, povera, già invecchiata, sempre curva su qualcosa, che non esce mai. Con il suo viso, il suo vestito, i suoi gesti, senza sapere quasi niente, io ripercorro la storia, o piuttosto la leggenda, di questa donna, e a volte la racconto a me stesso piangendo.

Se fosse stato un povero vecchio, avrei ricostruito la sua altrettanto facilmente.

Così me ne vado a letto, fiero di aver vissuto e sofferto per qualcuno che non sono io.

Forse mi direte: "Sei proprio sicuro che la leggenda sia quella vera?". Ma che cosa importa la realtà, se la mia leggenda mi ha aiutato a vivere, a sentire che io sono, e ciò che sono?

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Celui qui regarde du dehors à travers une fenêtre ouverte, ne voit jamais autant de choses que celui qui regarde une fenêtre fermée. Il n’est pas d’objet plus profond, plus mystérieux, plus fécond, plus ténébreux, plus éblouissant qu’une fenêtre éclairée d’une chandelle. Ce qu’on peut voir au soleil est toujours moins intéressant que ce qui se passe derrière une vitre. Dans ce trou noir ou lumineux vit la vie, rêve la vie, souffre la vie.

Par delà des vagues de toits, j’aperçois une femme mûre, ridée déjà, pauvre, toujours penchée sur quelque chose, et qui ne sort jamais. Avec son visage, avec son vêtement, avec son geste, avec presque rien, j’ai refait l’histoire de cette femme, ou plutôt sa légende, et quelquefois je me la raconte à moi-même en pleurant.

Si c’eût été un pauvre vieux homme, j’aurais refait la sienne tout aussi aisément.

Et je me couche, fier d’avoir vécu et souffert dans d’autres que moi-même.

Peut-être me direz-vous :  « Es-tu sûr que cette légende soit la vraie ? » Qu’importe ce que peut être la réalité placée hors de moi, si elle m’a aidé à vivre, à sentir que je suis et ce que je suis ?


(Charles Baudelaire; "Lo spleen di Parigi")

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